1958 : Europe des Six (pays fondateurs)
Allemagne choix de chaque Land ?
Belgique 2
France 3
Italie
Luxembourg
Pays-Bas 2
1973 : Europe des Neuf
Danemark
Irlande
Royaume-Uni mix 1 et 2 ?
1981 : Europe des Dix
Grèce 1
1986 : Europe des Douze
Espagne
Portugal 3
1995 : Europe des Quinze
Autriche 2 ?
Suède
Finlande
2004 : Europe des Vingt-cinq
Chypre
Estonie
Hongrie
Lettonie
Lituanie
Malte
Pologne 3
Slovaquie
Slovénie 3
République tchèque
2007 : Europe des Vingt-sept
Bulgarie
Roumanie
Bienvenue sur ce blog
Ce blog contient un recueil de textes (1) qui nous ont paru intéressants dans le cadre des réflexions sur la question "Europe et laïcité".
Ce recueil de textes sera enrichi au cours de nos travaux.
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lundi 31 décembre 2007
Relation Eglise/Etat - Classification
Classification relation Eglise/Etat
1. religion civile :
l'Etat reconnaît une religion particulière garante de lien social et de morale partagée (ex USA)
2. pluralisme
l'Etat reconnaît les principales familles de pensée religieuses ou non qui existent socialement
3. laïcité pure
l'Etat ne veut reconnaître publiquement aucune famille de pensée mais leur assure la liberté
d'exercice dans l'espace privé, (ex France)
1. religion civile :
l'Etat reconnaît une religion particulière garante de lien social et de morale partagée (ex USA)
2. pluralisme
l'Etat reconnaît les principales familles de pensée religieuses ou non qui existent socialement
3. laïcité pure
l'Etat ne veut reconnaître publiquement aucune famille de pensée mais leur assure la liberté
d'exercice dans l'espace privé, (ex France)
Libellés :
13 - Monde,
34 - Classification relation Eglises/Etat
samedi 15 décembre 2007
Laïcité et culture?
« L'engagement du Franc-Maçon peut-il être culturel ? »
(extraits/contribution au sujet : laïcité et culture ?)
« L'engagement ».
Montaigne disait à peu près ceci : s'il est dans la nature de la pensée qu'elle s'engage, cet engagement même ne vaut que dans la mesure où elle reste à tout moment capable de se désengager. Tiendrait-on dans cette formule l'un des credos de la pensée laïque ? peut-être.
Histoire du concept de culture
Ce sont les Lumières qui vont donner au mot culture hérité du latin ses lettres de noblesse, au moment où la philosophie de l'histoire se substitue à la théologie de l'histoire. Et ce terme va passer progressivement
du sens de : formation, éducation de l'esprit
au sens de : caractère distinctif de l'espèce humaine ou somme des savoirs accumulés et transmis par l'humanité, considérée comme totalité, au cours de son histoire.
Les sociologues, ethnologues et anthropologues tenteront au cours des deux ou trois siècles qui suivent de répondre à cette question : quels sont les rapports entre culture collective et personnalité individuelle ?
Au fil du temps, le substantif « culture » invariable à l'origine va s'imposer dans une forme plurielle. A côté de notre culture occidentale se sont développées d'autres cultures dont il est instructif pour la nôtre d'en étudier les caractères, ce que tous ces hommes illustres ont fait. Et même notre culture occidentale présente des variantes, par exemple quand on passe de la France à l'Allemagne. Mais ça, les Français n'ont pas eu besoin de grandes études pour s'en apercevoir très vite.
Des avancées importantes seront réalisées grâce aux travaux de gens comme Louis Dumont, travaux qui s'attachent à étudier aussi bien les différences que les points communs entre cultures. Dumont est un analyste déterminant de notre modernité et de l'individualisme contemporain déjà pointé par Tocqueville chez les Américains, au I9ème siècle.
Mais une véritable révolution du concept de culture se fera à partir des années 60 à travers
celui d'acculturation*.
L'acculturation est un terme qui désigne deux processus
le choc et l'interpénétration des cultures entre elles et aussi
le conflit dans chaque culture de ses évolutions avec ses traditions. A l'évidence, ce qui a provoqué ce type de réflexion c'est la décolonisation, ensuite relayée par l'immigration contemporaine et la cohorte de problèmes induits. L'acculturation n'est pas une assimilation qui verrait disparaître une culture, c'est un transfert progressif d'éléments symboliques ou non de la culture d'accueil vers l'autre. Les transferts dans l'autre sens sont bien sûr aussi observables.
En France le grand théoricien de l'acculturation est Roger Bastide. Ses travaux le conduisent à une vision optimiste de la marginalité culturelle en opposition à la conception pessimiste dominante inspirée par Lévy-Strauss qui, lui, parle plus volontiers de déculturation. Disons, pour simplifier, que Lévy-Strauss s'adresse aux mythes quand Bastide appelle la mémoire collective.
Bastide prend comme exemple les afro-américains qui ont créé des cultures originales et dynamiques.
C'est sous son impulsion qu'on conçoit enfin toute culture comme un composé (au sens de composé chimique); aucune culture n'existant à l'état pur.
Et nous en arrivons enfin au problème culturel majeur de nos sociétés : la promotion du
concept de culture-identité.
Les minorités clament que leurs cultures ont été spoliées par l'acculturation et font la
promotion d'une identité culturelle intouchable.
Ce fantasme de pureté est le plus souvent renforcé par des considérations ethniques et/ou
religieuses.
Longtemps resté tabou en France, c'est néanmoins un problème sérieux car ses conséquences
peuvent être
- grotesques : en réaction, depuis peu, en France, on observe le même mouvement ostentatoire de la culture majoritaire
- dramatiques : on a vu récemment dans l'ex Yougoslavie les dégâts que peuvent causer ces idées d'identité ethnique.
Et bien sûr, des spécialistes de tous horizons ne cessent de se pencher sur les revendications (de ces communautés minoritaires) qui mettent à mal nos sociétés occidentales. Quelle considération, quelle place, quel pouvoir leur accorder dans nos sociétés ?
Et enfin, pour terminer ce tour d'horizon historique, ultime assaut et de grande amplitude qui a mûri sur un demi-siècle au moins : la culture elle-même se voit mise en cause, n'ayant pas permis la sauvegarde de la nature, (cette planche ne s'attachera pas à ce dernier aspect.)
Le paysage culturel de l'Occident
Je n'ai fait que parler du regard que d'éminents esprits ont porté sur la culture, sur les
cultures. C'est certain, ils reflètent un peu le regard de leurs contemporains, ils synthétisent en
quelque sorte la culture de leur époque.
Mais, réellement, comment lire le mouvement général de notre culture, d'ici, depuis ce lieu-ci
et à cet instant ?
Nous avons l'avantage sur ces esprits éminents d'être à même, de notre point de vue, de
contempler le passé d'un paysage qui nous échoit, la culture occidentale, ce qu'on appelle
commodément la modernité.
Alors, quel est ce paysage culturel ?
Il apparaît comme un effort constant, obstiné, mais souvent déchaîné, de l'homme occidental à se défaire des figures imposées par les traditions, à rejeter les rôles attribués par les pouvoirs, pour tendre vers un but personnel, la production de soi.
L'homme occidental n'a plus ni rôle, ni forme, ni figure. Le sujet occidental est donné comme un rapport infini à soi. Il veut penser par lui-même, il veut faire l'expérience de lui-même. Est-on là en présence de l'homme laïque ? peut-être.
C'est cela la modernité. Soyons provocant : l'homme moderne ne croît plus au progrès, ni au sens de l'Histoire. Il ne croît plus à l'unité ni à l'universalité de la raison. D'ailleurs, il ne croît plus, ou au moins, il s'efforce de ne plus croire même si on l'aiguillonne pour l'y forcer. Mais la modernité, ce mouvement d'émancipation culturelle sans précédent, il ne faudrait pas considérer ce mouvement comme dépassé. Il est simplement inachevé. Il le restera d'ailleurs. C'est une tension.
En somme l'homme occidental peut enfin observer la voie où l'a placé l'individu « préhumain » dans son rêve primordial : réussir à s'extraire de la horde pour voler de ses propres ailes, si je puis dire.
C'est un rêve absolu de liberté. Il est évident qu'il ne réunit pas tous les hommes : il y a ceux
qui restent attachés à l'ancienne coutume.
Et ce rêve peut rapprocher les autres mais à la condition que cette voie soit reconnue et cette
quête de liberté assumée par chacun. Et, au seuil du 3ème millénaire, beaucoup, on le voit
autour de nous, beaucoup hésitent à franchir le pas.
Les maux dont nous souffrons témoignent de cette difficulté à gérer cet état, cette subjectivité,
comme disent les philosophes.
Et la réaction que nous voyons se déployer sous nos yeux aujourd'hui en France est peut-être
un projet, très cohérent dans son idéologie, de remise en cause... de notre société.
la Franc-Maçonnerie dans tout cela ?
Conversation entre maçons On pourra me dire :
- Qu'avons-nous à faire de la culture ? notre seul souci, c'est la République, ses valeurs. Je réponds :
- Oui, je sais, l'engagement du Franc-Maçon est d'abord politique. Le culturel... .(geste)
- Non, je veux bien revenir à la culture-identité, ce problème très actuel, mais d'une façon ou d'une autre, on tourne autour de l'identité religieuse, et là n'est-on pas, justement, dans la réflexion maçonnique ? reconnais-le, mon Frère, on tombe pile sur la laïcité et la loi de 1905 que nous avons toujours défendue becs et ongles, loi renforcée en 2004 ; alors, ça ne suffit pas?
- Bien sûr, mais là, on a quelque chose qui dépasse la loi de séparation, cette revendication identitaire, qui va bien au-delà du religieux.
- Excuse-moi, mon Frère, mais la République ne peut être séparée de la notion de citoyenneté. L'immigré, parce qu'il s'agit de lui, doit accepter, vivant en France, d'être citoyen de la République...
- Mais tu ne fais qu'agiter là une notion politique, cette citoyenneté, cette idée d'espace commun, c'est d'abord politique
- Le « vivre ensemble », n'est-ce pas un problème politique ?
- Pas seulement... mais d'abord, conviens donc que cette histoire de citoyenneté c'est une abstraction difficile, hors de portée... des jeunes par exemple
- Et bien, ils l'apprendront au collège
- Tu crois qu'au collège on leur enseigne ?
- Alors, à quoi sert l'instruction publique, d'après toi ?
- Bon, je me suis mal fait comprendre, mon idée c'est que nous ne pouvons pas tout ramener au politique
- Mais c'est ainsi que s'est forgée notre communauté républicaine, sur le politique, nous n'y pouvons rien
- Je vois, ça nous évite de traiter le problème culturel !
- Mais non, il ne s'agit pas de ça : nous utilisons l'outil que l'histoire nous a laissé en héritage : nous avons un modèle exceptionnel pour répondre au problème de l'intégration, le modèle républicain...
- Ah oui, l'exception française... mais ce « modèle » est discutable, d'ailleurs il est loin de fonctionner... beaucoup ne veulent pas en entendre parler, et ceux qui en parlent s'abîment dans des débats interminables, chacun restant généralement sur ses positions... voilà, le modèle n'est plus accepté... naturellement
- On refuse de comprendre tout simplement : ce modèle, héritier de notre histoire, est légitime. Si on ne veut pas l'accepter, alors, imposons-le !
- C'est ça, en créant un ministère de l'identité française, par exemple ? !
A-t-on intérêt à se cantonner à notre bonne et vieille conception de la République Française ?
Au-dessous de ces valeurs essentielles, n'y a-t-il pas la place pour des valeurs secondaires,
celles de la culture ?
Peut-on exiger d'un immigré qu'il adhère sans faille à la notion de citoyenneté quand un
Français sur trois ne se donne pas la peine d'aller aux urnes ?
Peut-on seulement s'arrimer à la loi de séparation des Eglises et de l'Etat pour défendre la
laïcité, alors que la revendication identitaire va bien au-delà de l'identité induite par la
religion ? N'opposer à ces revendications que la loi de 1905, n'est-ce pas le piège qui nous est
tendu : placer au niveau de la symbolique de la République, de ses valeurs, celle des
religions ?
Je me demande si la position de la Franc-Maçonnerie (position, car tout semble figé dans la politique menée pendant ce dernier quart de siècle par le GO), position défensive, est la bonne. Je me demande si nous ne devrions pas au contraire passer à l'offensive.
Donc engagement offensif plutôt qu'attitude défensive, mais de quelle façon ?
Sans revenir sur les ratés du passé, je me demande si nous ne devrions pas dépasser le concept
d'Espace Public, celui où les citoyens confrontent leurs opinions politiques, pour élargir notre
réflexion à la culture laïque, dépassant les cadres politique et religieux où il me semble que
nous nous enfermons.
Ce blocage peut d'ailleurs s'expliquer : la République a émergé du conflit Eglise/Etat et,
depuis, en tant qu'association de libres penseurs, nous nous posons ajuste titre comme les
gardiens de la République ainsi créée et de ses valeurs.
Car la laïcité va en effet bien plus loin : c'est une façon de vivre, de penser, de nouer des
relations avec autrui.
Vivre laïque, c'est vivre une certaine culture, qui, précisons le, dépasse largement les contours
d'une culture que certains nomment française.
Et, n'en déplaise à ceux qui raillent notre prétention universaliste, la culture laïque, c'est une
culture identifiée, expérimentée, authentifiée en France, mais qui se déploie probablement
vers une acception universelle.
Et en cela, la culture laïque ne peut rejoindre l'identité française qui, elle, exhale des relents
nationalistes.
La culture laïque, c'est une culture qui ne s'oppose à aucune autre culture si tant est que cette
dernière respecte les droits de l'Homme.
La culture laïque demande non à être clamée mais à être approfondie dans la réflexion, vécue
dans la discrétion. La culture laïque est paradoxalement une culture de la retenue, de
l'effacement. C'est peut-être ce qui la rend si vulnérable aujourd'hui.
A l'heure actuelle, ne devrait-on pas réactiver une dimension opérative de la Franc-Maçonnerie dans une direction où convergerait le chemin laïque de notre engagement et les routes que prennent les immigrés ?
La base républicaine de notre société ne suffit pas à réunir ces cultures ; le communautarisme est une facilité qu'il nous faut surveiller et rejeter sans désemparer. Au fond de chaque culture est sans doute inscrite son universalité. Nous seuls avons eu l'audace d'exprimer ce que la nôtre portait d'universel. Il ne faut pas en avoir honte. Nous devons croire et contribuer au métissage des cultures en les rapprochant. La Franc-Maçonnerie pourrait-elle être le catalyseur de ce métissage ?
(extraits/contribution au sujet : laïcité et culture ?)
« L'engagement ».
Montaigne disait à peu près ceci : s'il est dans la nature de la pensée qu'elle s'engage, cet engagement même ne vaut que dans la mesure où elle reste à tout moment capable de se désengager. Tiendrait-on dans cette formule l'un des credos de la pensée laïque ? peut-être.
Histoire du concept de culture
Ce sont les Lumières qui vont donner au mot culture hérité du latin ses lettres de noblesse, au moment où la philosophie de l'histoire se substitue à la théologie de l'histoire. Et ce terme va passer progressivement
du sens de : formation, éducation de l'esprit
au sens de : caractère distinctif de l'espèce humaine ou somme des savoirs accumulés et transmis par l'humanité, considérée comme totalité, au cours de son histoire.
Les sociologues, ethnologues et anthropologues tenteront au cours des deux ou trois siècles qui suivent de répondre à cette question : quels sont les rapports entre culture collective et personnalité individuelle ?
Au fil du temps, le substantif « culture » invariable à l'origine va s'imposer dans une forme plurielle. A côté de notre culture occidentale se sont développées d'autres cultures dont il est instructif pour la nôtre d'en étudier les caractères, ce que tous ces hommes illustres ont fait. Et même notre culture occidentale présente des variantes, par exemple quand on passe de la France à l'Allemagne. Mais ça, les Français n'ont pas eu besoin de grandes études pour s'en apercevoir très vite.
Des avancées importantes seront réalisées grâce aux travaux de gens comme Louis Dumont, travaux qui s'attachent à étudier aussi bien les différences que les points communs entre cultures. Dumont est un analyste déterminant de notre modernité et de l'individualisme contemporain déjà pointé par Tocqueville chez les Américains, au I9ème siècle.
Mais une véritable révolution du concept de culture se fera à partir des années 60 à travers
celui d'acculturation*.
L'acculturation est un terme qui désigne deux processus
le choc et l'interpénétration des cultures entre elles et aussi
le conflit dans chaque culture de ses évolutions avec ses traditions. A l'évidence, ce qui a provoqué ce type de réflexion c'est la décolonisation, ensuite relayée par l'immigration contemporaine et la cohorte de problèmes induits. L'acculturation n'est pas une assimilation qui verrait disparaître une culture, c'est un transfert progressif d'éléments symboliques ou non de la culture d'accueil vers l'autre. Les transferts dans l'autre sens sont bien sûr aussi observables.
En France le grand théoricien de l'acculturation est Roger Bastide. Ses travaux le conduisent à une vision optimiste de la marginalité culturelle en opposition à la conception pessimiste dominante inspirée par Lévy-Strauss qui, lui, parle plus volontiers de déculturation. Disons, pour simplifier, que Lévy-Strauss s'adresse aux mythes quand Bastide appelle la mémoire collective.
Bastide prend comme exemple les afro-américains qui ont créé des cultures originales et dynamiques.
C'est sous son impulsion qu'on conçoit enfin toute culture comme un composé (au sens de composé chimique); aucune culture n'existant à l'état pur.
Et nous en arrivons enfin au problème culturel majeur de nos sociétés : la promotion du
concept de culture-identité.
Les minorités clament que leurs cultures ont été spoliées par l'acculturation et font la
promotion d'une identité culturelle intouchable.
Ce fantasme de pureté est le plus souvent renforcé par des considérations ethniques et/ou
religieuses.
Longtemps resté tabou en France, c'est néanmoins un problème sérieux car ses conséquences
peuvent être
- grotesques : en réaction, depuis peu, en France, on observe le même mouvement ostentatoire de la culture majoritaire
- dramatiques : on a vu récemment dans l'ex Yougoslavie les dégâts que peuvent causer ces idées d'identité ethnique.
Et bien sûr, des spécialistes de tous horizons ne cessent de se pencher sur les revendications (de ces communautés minoritaires) qui mettent à mal nos sociétés occidentales. Quelle considération, quelle place, quel pouvoir leur accorder dans nos sociétés ?
Et enfin, pour terminer ce tour d'horizon historique, ultime assaut et de grande amplitude qui a mûri sur un demi-siècle au moins : la culture elle-même se voit mise en cause, n'ayant pas permis la sauvegarde de la nature, (cette planche ne s'attachera pas à ce dernier aspect.)
Le paysage culturel de l'Occident
Je n'ai fait que parler du regard que d'éminents esprits ont porté sur la culture, sur les
cultures. C'est certain, ils reflètent un peu le regard de leurs contemporains, ils synthétisent en
quelque sorte la culture de leur époque.
Mais, réellement, comment lire le mouvement général de notre culture, d'ici, depuis ce lieu-ci
et à cet instant ?
Nous avons l'avantage sur ces esprits éminents d'être à même, de notre point de vue, de
contempler le passé d'un paysage qui nous échoit, la culture occidentale, ce qu'on appelle
commodément la modernité.
Alors, quel est ce paysage culturel ?
Il apparaît comme un effort constant, obstiné, mais souvent déchaîné, de l'homme occidental à se défaire des figures imposées par les traditions, à rejeter les rôles attribués par les pouvoirs, pour tendre vers un but personnel, la production de soi.
L'homme occidental n'a plus ni rôle, ni forme, ni figure. Le sujet occidental est donné comme un rapport infini à soi. Il veut penser par lui-même, il veut faire l'expérience de lui-même. Est-on là en présence de l'homme laïque ? peut-être.
C'est cela la modernité. Soyons provocant : l'homme moderne ne croît plus au progrès, ni au sens de l'Histoire. Il ne croît plus à l'unité ni à l'universalité de la raison. D'ailleurs, il ne croît plus, ou au moins, il s'efforce de ne plus croire même si on l'aiguillonne pour l'y forcer. Mais la modernité, ce mouvement d'émancipation culturelle sans précédent, il ne faudrait pas considérer ce mouvement comme dépassé. Il est simplement inachevé. Il le restera d'ailleurs. C'est une tension.
En somme l'homme occidental peut enfin observer la voie où l'a placé l'individu « préhumain » dans son rêve primordial : réussir à s'extraire de la horde pour voler de ses propres ailes, si je puis dire.
C'est un rêve absolu de liberté. Il est évident qu'il ne réunit pas tous les hommes : il y a ceux
qui restent attachés à l'ancienne coutume.
Et ce rêve peut rapprocher les autres mais à la condition que cette voie soit reconnue et cette
quête de liberté assumée par chacun. Et, au seuil du 3ème millénaire, beaucoup, on le voit
autour de nous, beaucoup hésitent à franchir le pas.
Les maux dont nous souffrons témoignent de cette difficulté à gérer cet état, cette subjectivité,
comme disent les philosophes.
Et la réaction que nous voyons se déployer sous nos yeux aujourd'hui en France est peut-être
un projet, très cohérent dans son idéologie, de remise en cause... de notre société.
la Franc-Maçonnerie dans tout cela ?
Conversation entre maçons On pourra me dire :
- Qu'avons-nous à faire de la culture ? notre seul souci, c'est la République, ses valeurs. Je réponds :
- Oui, je sais, l'engagement du Franc-Maçon est d'abord politique. Le culturel... .(geste)
- Non, je veux bien revenir à la culture-identité, ce problème très actuel, mais d'une façon ou d'une autre, on tourne autour de l'identité religieuse, et là n'est-on pas, justement, dans la réflexion maçonnique ? reconnais-le, mon Frère, on tombe pile sur la laïcité et la loi de 1905 que nous avons toujours défendue becs et ongles, loi renforcée en 2004 ; alors, ça ne suffit pas?
- Bien sûr, mais là, on a quelque chose qui dépasse la loi de séparation, cette revendication identitaire, qui va bien au-delà du religieux.
- Excuse-moi, mon Frère, mais la République ne peut être séparée de la notion de citoyenneté. L'immigré, parce qu'il s'agit de lui, doit accepter, vivant en France, d'être citoyen de la République...
- Mais tu ne fais qu'agiter là une notion politique, cette citoyenneté, cette idée d'espace commun, c'est d'abord politique
- Le « vivre ensemble », n'est-ce pas un problème politique ?
- Pas seulement... mais d'abord, conviens donc que cette histoire de citoyenneté c'est une abstraction difficile, hors de portée... des jeunes par exemple
- Et bien, ils l'apprendront au collège
- Tu crois qu'au collège on leur enseigne ?
- Alors, à quoi sert l'instruction publique, d'après toi ?
- Bon, je me suis mal fait comprendre, mon idée c'est que nous ne pouvons pas tout ramener au politique
- Mais c'est ainsi que s'est forgée notre communauté républicaine, sur le politique, nous n'y pouvons rien
- Je vois, ça nous évite de traiter le problème culturel !
- Mais non, il ne s'agit pas de ça : nous utilisons l'outil que l'histoire nous a laissé en héritage : nous avons un modèle exceptionnel pour répondre au problème de l'intégration, le modèle républicain...
- Ah oui, l'exception française... mais ce « modèle » est discutable, d'ailleurs il est loin de fonctionner... beaucoup ne veulent pas en entendre parler, et ceux qui en parlent s'abîment dans des débats interminables, chacun restant généralement sur ses positions... voilà, le modèle n'est plus accepté... naturellement
- On refuse de comprendre tout simplement : ce modèle, héritier de notre histoire, est légitime. Si on ne veut pas l'accepter, alors, imposons-le !
- C'est ça, en créant un ministère de l'identité française, par exemple ? !
A-t-on intérêt à se cantonner à notre bonne et vieille conception de la République Française ?
Au-dessous de ces valeurs essentielles, n'y a-t-il pas la place pour des valeurs secondaires,
celles de la culture ?
Peut-on exiger d'un immigré qu'il adhère sans faille à la notion de citoyenneté quand un
Français sur trois ne se donne pas la peine d'aller aux urnes ?
Peut-on seulement s'arrimer à la loi de séparation des Eglises et de l'Etat pour défendre la
laïcité, alors que la revendication identitaire va bien au-delà de l'identité induite par la
religion ? N'opposer à ces revendications que la loi de 1905, n'est-ce pas le piège qui nous est
tendu : placer au niveau de la symbolique de la République, de ses valeurs, celle des
religions ?
Je me demande si la position de la Franc-Maçonnerie (position, car tout semble figé dans la politique menée pendant ce dernier quart de siècle par le GO), position défensive, est la bonne. Je me demande si nous ne devrions pas au contraire passer à l'offensive.
Donc engagement offensif plutôt qu'attitude défensive, mais de quelle façon ?
Sans revenir sur les ratés du passé, je me demande si nous ne devrions pas dépasser le concept
d'Espace Public, celui où les citoyens confrontent leurs opinions politiques, pour élargir notre
réflexion à la culture laïque, dépassant les cadres politique et religieux où il me semble que
nous nous enfermons.
Ce blocage peut d'ailleurs s'expliquer : la République a émergé du conflit Eglise/Etat et,
depuis, en tant qu'association de libres penseurs, nous nous posons ajuste titre comme les
gardiens de la République ainsi créée et de ses valeurs.
Car la laïcité va en effet bien plus loin : c'est une façon de vivre, de penser, de nouer des
relations avec autrui.
Vivre laïque, c'est vivre une certaine culture, qui, précisons le, dépasse largement les contours
d'une culture que certains nomment française.
Et, n'en déplaise à ceux qui raillent notre prétention universaliste, la culture laïque, c'est une
culture identifiée, expérimentée, authentifiée en France, mais qui se déploie probablement
vers une acception universelle.
Et en cela, la culture laïque ne peut rejoindre l'identité française qui, elle, exhale des relents
nationalistes.
La culture laïque, c'est une culture qui ne s'oppose à aucune autre culture si tant est que cette
dernière respecte les droits de l'Homme.
La culture laïque demande non à être clamée mais à être approfondie dans la réflexion, vécue
dans la discrétion. La culture laïque est paradoxalement une culture de la retenue, de
l'effacement. C'est peut-être ce qui la rend si vulnérable aujourd'hui.
A l'heure actuelle, ne devrait-on pas réactiver une dimension opérative de la Franc-Maçonnerie dans une direction où convergerait le chemin laïque de notre engagement et les routes que prennent les immigrés ?
La base républicaine de notre société ne suffit pas à réunir ces cultures ; le communautarisme est une facilité qu'il nous faut surveiller et rejeter sans désemparer. Au fond de chaque culture est sans doute inscrite son universalité. Nous seuls avons eu l'audace d'exprimer ce que la nôtre portait d'universel. Il ne faut pas en avoir honte. Nous devons croire et contribuer au métissage des cultures en les rapprochant. La Franc-Maçonnerie pourrait-elle être le catalyseur de ce métissage ?
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